O. DUCROT
LOGIQUE ET LINGUISTIQUE
INTRODUCTION
I. — Langage et inférence logique.
Il existe, entre certains énoncés du langage ordinaire, des relations d'inférence, telles que, si l'on admet les uns, on est forcé d'admettre les autres. Ainsi on ne peut tenir pour vrai « Quelques hommes sont méchants », sans admettre aussi « Quelques êtres méchants sont hommes », ou encore affirmer « Le baromètre a baissé », sans accepter la conclusion « II y a de bonnes chances qu'il pleuve ». Parmi ces relations, d'autre part, il en est un bon nombre — celles qui intéressent le logicien — qui sont parfaitement indépendantes du monde extérieur. Ainsi la première que nous avons citée s'impose, que les concepts ď « homme » et de « méchanceté » correspondent ou non à des données effectives, qu'il y ait en fait des hommes méchants ou non : aucun bouleversement de la réalité empirique ne saurait donc lui retirer sa validité. Nous parlerons, dans ce cas, de relations d'inférence logique, ou, par abréviation, de relations d'inférence. Une première question possible, quand on examine les rapports de la logique et de la linguistique, est de savoir si de telles relations entre énoncés d'un langage relèvent de ce langage lui-même, si donc le linguiste, décrivant une langue, a l'obligation d'indiquer quels énoncés peuvent
1. Pour nous référer aux travaux mentionnés dans la bibliographie des pages 136, nous indiquerons seulement le nom de l'auteur, et le numéro de l'article ou l'ouvrage dans la bibliographie.
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