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A Palmyre, le temple de Baalshamin détruit à l’explosif par les djihadistes

Le temple était l’un des plus importants du site de cette ville syrienne, classé au Patrimoine de l’humanité par l’Unesco.

Par  et  (Jérusalem, correspondant)

Publié le 24 août 2015 à 01h12, modifié le 29 août 2015 à 16h57

Temps de Lecture 3 min.

Le temple de Baalshamin à Palmyre en Syrie, le 14 mars 2014.

Trois mois après la prise par l’organisation Etat islamique (EI) de Palmyre, l’un des plus importants sites archéologiques préislamiques de Syrie et du Proche-Orient, les premières annonces de destructions majeures commencent à arriver. Le directeur des antiquités et des musées de Syrie, Maamoun Abdulkarim, a déploré dimanche 23 août l’anéantissement à l’explosif du petit temple de Baalshamin, un des joyaux du site antique. Sa cella, partie close, a été détruite et ses colonnes se sont effondrées.

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, qui cite des habitants de Tadmor, la ville moderne proche du site, cette destruction a eu lieu il y a un mois. Aucune de ces vidéos devenues familières, montrant des djihadistes pioches et explosifs en main, n’a encore été diffusée par le groupe, qui semble ménager ses effets. Il y a moins d’une semaine, l’EI avait décapité l’ancien chef des antiquités du site, Khaled Al-Assaad, 82 ans. L’Unesco avait dénoncé le 3 juillet un « spectacle d’une perversité glaçante »,après la destruction de bustes funéraires en place publique.

Cette oasis, située aux franges de l’Empire romain d’Orient, était sous l’empereur Tibère, au premier siècle avant notre ère, une cité caravanière de premier plan, plaque tournante des échanges entre la Chine, l’Inde, la Perse et Rome. En 139, Hadrien lui accordera le statut de province romaine. Ses commerçants financeront la construction de la cité antique, reprenant à leur compte « l’habillage » architectural gréco-romain – colonnades, chapiteaux corinthiens, frontons, pierres de taille.

Situé au nord du monumental temple de Bel – dédié au dieu Soleil, dieu de la foudre, divinité sémitique principale, et remarquablement conservé –, le petit temple de Baalshamin était un passage obligé des 150 000 visiteurs annuels du site avant que n’éclate la révolution en Syrie, en 2011.

Lire notre enquête Article réservé à nos abonnés A Palmyre : « Ils ont tué l’archéologue ! »

« Ils n’arrêteront jamais ! »

Pierre Leriche, directeur de recherche au CNRS, responsable des fouilles du site de Doura Europos, situé à 300 km à l’est, est effondré : « Ils n’arrêteront jamais ! Entouré d’une colonnade, gracieux, délicat, c’était le plus beau [temple]. Très bien proportionné, intelligemment pensé, on le voyait depuis la terrasse de l’hôtel Zénobie. On ne pouvait le visiter, un arbre avait poussé à l’intérieur. Il était conservé jusqu’au sommet, avec sa frise au décor floral. » Baalshamin, divinité secondaire, était le dieu plus humain, intercédant en faveur du peuple.

Ce saccage n’est que le dernier épisode d’une destruction systématique du patrimoine préislamique sur le territoire contrôlé par l’EI. En février, le groupe avait détruit des trésors du musée de Mossoul et du site antique voisin de Ninive, dans le nord de l’Irak. En mars, il s’en prenait à la ville parthe d’Hatra, toujours en Irak, et le mois suivant aux vestiges de la capitale assyrienne de Nimrod.

Ces destructions obéissent à un objectif politique : l’EI s’attache à fonder un Etat inspiré par le salafisme, une vision de l’islam revenant aux sources purifiées et fantasmées de cette religion, et principalement défendue par la monarchie saoudienne. Avant l’islam : le désert, proclame ainsi l’EI. Le groupe utilise également ces destructions pour renvoyer à son impuissance la coalition internationale menée par les Etats-Unis qui bombarde ses positions depuis un an sans le faire reculer.

Les éléments architecturaux et les statues monumentales en sont les principales victimes. Les vestiges transportables sont revendus discrètement à l’étranger par le truchement de réseaux de contrebande. L’EI, tout comme d’autres parties du conflit, y compris le régime, s’adonnent à ce trafic.

L’EI utilise également ces destructions pour renvoyer à son impuissance la coalition internationale menée par les Etats-Unis qui bombarde ses positions depuis un an sans le faire reculer

Du point de vue militaire, Palmyre est une étape sur un corridor du centre de la Syrie reliant Deir ez-Zor, base de l’EI dans l’est syrien, à Homs et aux montagnes frontalières du Liban, où l’EI combat le régime. Le groupe avait avancé sans difficulté, en mai, dans la plaine désertique qui sépare Deir ez-Zor de Palmyre, isolant les dernières positions du régime.

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Palmyre est la première ville prise directement par le groupe aux forces du régime syrien, qui s’en étaient retirées en prétendant avoir évacué les civils, ce qui s’est révélé faux. L’EI a ensuite engagé une épuration contre les collaborateurs supposés du régime.

Avant de s’en prendre aux ruines antiques, l’EI avait fait sauter la prison de la ville, symbole de la répression du régime dans les années 1980, fermé puis rouvert pour accueillir les manifestants de 2011. L’EI s’était également emparé des champs gaziers voisins d’Al-Hail et d’Arak, source d’électricité pour les zones tenues par le régime à l’ouest.

Revoir en vidéo notre éclairage « Pourquoi Palmyre est un joyau antique » :

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