Retour d'un échange à l'étranger, ou le difficile oubli d'un "paradis artificiel"

Certains regrettent le retour, d'autres sont plutôt soulagés.

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Par C. Phayakhuan

Chili, Canada, Taïwan, Angleterre, Japon et même Inde : de plus en plus d’opportunités s’offrent aux étudiants qui souhaitent étudier à l’étranger. Pour certains, le retour a l’effet d’un réveil difficile des jours de gueule de bois.

Période éphémère de liberté totale

Les programmes d’échange scolaire permettent avant tout d’étudier quelques mois dans un pays étranger, tout en ayant l’occasion de découvrir le pays d’accueil. Une expérience immersive durant laquelle les étudiants laissent de côté les responsabilités pour se donner plus de libertés.

Juliette était partie étudier la langue de Shakespeare à Londres, avant d’entamer ses études supérieures. Elle résume son échange à une opportunité de prendre un peu d’indépendance. "C’est comme si je mettais un petit pas dans la vie active, sans vraiment l’être", explique-t-elle.

Pour Killian, parti six mois au Chili l’an dernier, son échange Erasmus était comme une récompense tant attendue de trois ans et demi de dur labeur. Récompense à laquelle il a pris goût, même s’il était pleinement conscient que "c’est une période éphémère où tu sais que tu as un paradis artificiel. Pendant six mois, j’étais seul (avec un certain) un confort de vie parce je n’avais pas un boulot, je ne devais pas avoir de revenus, mais je pouvais quand même faire la fête et voyager".

Alors, forcément, au retour, difficile d’oublier ces mois de liberté et d’insouciance. Deux choses desquelles Raphaël a eu du mal à se séparer, tout comme d’autres. Il a été étudiant dans une université taïwanaise durant un semestre. À son retour, la routine s’est installée.

Juliette, elle, avait décidé de tout effacer pour prendre une pause de six mois : "Quand tu reviens ici, t’as de nouveau tous les fardeaux de la vie quotidienne, de la famille, des amis... Tout te retombe dessus et il faut apprendre à gérer. Et ça a été un coup dur pendant une semaine".

Mais c’est la séparation de ses nouveaux amis qu’elle a eu du mal à digérer. "Je n’ai pas eu le mal du pays à proprement parler, mais plutôt un mal relationnel. C’était énorme", poursuit-elle.

J’avais l’impression d’avoir fait le tour des personnes autour de moi

Être en échange à l’étranger signifie souvent nouveau challenge chaque jour. Que ce soit se déplacer, communiquer, assister aux cours : tout est à découvrir et à apprendre et s’adapter à la vie locale. Ce sont ces défis qui semblent manquer à ces étudiants.

"J’ai découvert un nouvel aspect qu’on ne peut pas connaître juste en voyageant quelques semaines", témoigne Éline, étudiante en sciences politiques, partie étudier au Japon. "Je m’y suis tellement plu que forcément, en comparaison, revenir à ma vie d’avant avec mes obligations et responsabilités, c’était moins excitant que la vie dans une grande ville comme Tokyo. J’avais aussi l’impression d’avoir fait le tour des personnes autour de moi."

 

Blues pour tout le monde ?

Pas tellement. Si l’échange d'Éline s’est plutôt bien déroulé au Japon, elle ne regrette toutefois pas le retour de son échange au Canada durant son bachelier. "Je me sentais pas aussi à l’aise au Canada que ce que je pensais", regrette l’étudiante. "En rentrant, j’étais plutôt soulagée de retrouver ma famille. Tout le monde était en examen, j’ai pu me réhabituer à la vie tranquillement."

Même chose pour Chloé: son retour était plutôt un soulagement. Elle est partie en échange après sa dernière année de secondaire en 2013. Durant dix mois, la jeune fille s’était retrouvée dans un pays culturellement aux antipodes de la Belgique : l’Inde. "Quand on est sur place, on a accès à rien de ce dont on a l’habitude", raconte l’étudiante en Histoire de l’Art et Archéologie. "Alors, au retour, on est content de retrouver ces petites choses-là. Mais du coup, rien ne nous rappelle notre vie dans le pays d’accueil. Dans un sens, c’est plus facile (de revenir)."

Blues pour toujours ?

Tout comme leur échange, le manque ne dure qu’un temps. Raphaël relativise car au final, “on change ses plans, on se fixe des objectifs et ça atténue un peu ce sentiment (de déprime). Et tout redevient à la normale". Killian, pour qui la déprime a bien duré presque un mois, s'est pris en main en rejoignant une entreprise pour un stage, même si le Chili occupe encore ses pensées. 

Ils ont réussi à me sortir de cette bulle de solitude que je m’étais formée tout seule

 

Mais l’envie de partir est persistante. Tous les cinq sont repartis ou veulent repartir visiter le pays qui les a accueillis le temps d’un échange.

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