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Interview

Michel Sapin : « Il faut compenser sans attendre la suspension de l’écotaxe »

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Michel Sapin, ministre du Budget.

Par Frédéric Schaeffer, Étienne Lefebvre, Elsa Conesa

Publié le 13 oct. 2014 à 19:53

Le projet de loi de finances ainsi que le budget de la Sécurité sociale arrivent en discussion à l’Assemblée. Faudra-t-il en passer par le 49-3 ?

Non, la question du 49-3 ne se pose pas. Je n’ai aucune inquiétude sur l’issue du vote. Il y aura un débat d’abord avec l’opposition, et plus il se clarifiera, mieux ce sera. Cela permettra de faire apparaître que notre politique économique emporte la conviction d’une majorité nette de députés.

Une partie de la majorité ne semble pourtant pas convaincue…

Il y a trois dimensions dans ce budget. D’abord, c’est un budget de vérité. La croissance est faible, elle ne cesse d’être revue à la baisse et l’inflation est en dessous de toutes les prévisions. Nous avons donc adapté nos hypothèses, qui sont parfaitement sincères. Deuxième axe : les baisses de prélèvements sur les entreprises. La politique de l’offre est inscrite dans les faits. Le maintien de ce cap est la condition du retour de la confiance. Troisième axe : les 21 milliards d’économies. Elles sont là, elles pèsent à la fois sur l’Etat, les régimes sociaux et les collectivités. Ces trois dimensions sont, il me semble, de mieux en mieux acceptées au sein de la majorité parlementaire.

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Sur les 21 milliards, les économies sur la protection sociale restent mystérieuses : 2 à 3 milliards manquent toujours à l’appel…

Ces économies seront détaillées au cours de l’examen parlementaire du budget de la Sécurité sociale.

Les députés veulent mettre en place un mécanisme de remboursement accéléré de TVA qui inciterait les collectivités à investir malgré la baisse des dotations. Y êtes-vous favorable ?

Il faut que les collectivités réduisent leurs dépenses de fonctionnement, et non leurs investissements. Tout ce qui permettra que leurs ressources soient affectées à l’investissement sera donc regardé avec intérêt. Mais il n’est pas question que cela augmente les dépenses de l’Etat et donc le déficit. Les mesures de trésorerie consistant à accélérer les remboursements de TVA sont des dépenses. Le coût se chiffrerait en milliards d’euros.

Les prélèvements sur les CCI peuvent-ils être amendés ?

Les mêmes acteurs qui réclament des baisses de dépenses publiques considèrent que cela ne doit pas s’appliquer à eux. Personne ne peut s’exonérer de l’effort.

Etes-vous favorable à la modulation des allocations familiales ?

Le sujet est délicat, car nous devons préserver notre dynamisme démographique. Mais les efforts doivent être faits partout, et ils sont proportionnellement moins élevés dans la branche famille que dans d’autres secteurs. Des propositions d’économies sont faites par le gouvernement, nous allons laisser une vraie capacité de débat au Parlement si celui-ci veut avancer des propositions alternatives.

Faut-il réformer rapidement l’assurance-chômage dont la dette ne cesse de s’accumuler ?

Ce n’est pas un sujet qui concerne le budget de 2015. Les partenaires sociaux, qui sont conscients du problème financier, ont dit depuis le début, dans le cadre de leur accord, qu’ils mettraient en place un groupe de travail pour faire évoluer les règles de l’assurance-chômage à l’horizon de la mi-2016. Cette concertation pourra donc avoir lieu tout au long de l’année prochaine. Il en va de même pour les régimes complémentaires de retraite Agirc-Arrco : ils ont rendez-vous en 2015 et je ne doute pas qu’ils sauront trouver, comme à chaque fois, des solutions courageuses pour rétablir les comptes.

Faut-il compenser dès le budget 2015 la suspension de l’écotaxe ?

Même en prenant en compte la hausse de deux centimes sur le gazole, la suspension de l’écotaxe créée un manque à gagner d’environ 250 millions qu’il faut compenser. Le financement des infrastructures est en jeu, de nombreux projets étant prêts à être lancés. Je ne doute pas que nous trouverons un dispositif de substitution.

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Certains élus, notamment écologistes, proposent que les poids-lourds ne soient pas exonérés, comme c’est prévu, de la hausse du diesel…

Nous sommes ouverts aux propositions. La question des exonérations pourra être posée pendant le débat parlementaire.

La recette peut-elle venir des sociétés d’autoroutes ?

C’est une bonne idée de vouloir les faire contribuer davantage, alors qu’elles ont été privatisées dans des conditions trop avantageuses. Et si certaines dispositions peuvent être prises par voie législative, il faut les examiner. Mais je ne suis pas sûr qu’une solution puisse être trouvée pour financer des projets dès 2015, or je répète que la compensation de l’écotaxe ne peut pas attendre.

Soutiendrez-vous l’amendement intégrant les œuvres d’art dans l’ISF ?

Cet amendement est préparé tous les ans, et tous les ans il est au bout du compte rejeté ! Le gouvernement n’y est pas favorable : le marché de l’art repose sur des équilibres fragiles, il ne faut pas les remettre en cause.

Quid d’un coup de pouce pour l’emploi à domicile ?

La mesure que nous avions incluse dans le collectif social cet été a été censurée par le Conseil constitutionnel. Il est légitime de la réétudier, dès lors qu’elle est financée.

Faut-il réserver ce geste à la garde d’enfants ?

Il n’est pas anormal, en effet, de différencier les frais liés à la garde d’enfants d’autres prestations, qui ne sont pas liées à la priorité accordée à nos politiques familiales.

La fusion de la prime pour l’emploi et du RSA, pour entrer en vigueur en 2016, doit être actée par une suppression rapide de la PPE, afin que des droits ne soient pas créés au titre de 2015. Or il n’y a rien dans le budget…

Cette mesure figurera dans le collectif budgétaire de fin d’année, pour permettre la mise en place de la réforme en 2016.

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