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Questions autour de la crise de la zone euro

Les conséquences à attendre après la dégradation des notes financières de la Grèce, le Portugal et l'Espagne par Standard & Poor's.


 » La Grèce peut-elle quitter la zone euro ?

» Quel est le rôle des agences de notation ?

» La Grèce peut-elle faire faillite ?

» Y a-t-il un risque de contagion au reste de la zone euro ?

» Quels risques pour les banques européennes?

» Pourquoi les marchés attaquent-ils aussi le Portugal ?

» La France a-t-elle des raisons de s'inquiéter ?


• La Grèce peut-elle quitter la zone euro ?

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Le voudrait-elle - en dépit des risques financiers encourus -, la Grèce aurait les plus grandes difficultés à sortir de la zone euro pour des raisons juridiques. Si un État membre peut être expulsé de l'UE s'il ne respecte plus les critères politiques, cette option n'est pas prévue par les traités pour la zone euro. Ce vide juridique est sujet à interprétation. «Il serait légalement inconcevable qu'un État membre sorte de la zone euro sans se retirer en parallèle de l'Union européenne», assure Phoebus Athanassiou, conseiller juridique auprès de la BCE. Quant à une expulsion de l'Union monétaire, elle serait «quasiment impossible d'un point de vue légal», car il faudrait amender les traités à l'unanimité, souligne-t-il, dans une note de recherche. Angela Merkel avait réclamé en mars la possibilité d'exclure un pays ne remplissant pas les conditions d'appartenance à la monnaie unique. Sans réviser les traités, cette option de l'expulsion serait «peut-être faisable par des voies détournées», en instituant de fait une union monétaire à deux vitesses. Le pays sortant pourrait conserver l'euro comme monnaie parallèle. Mais il s'agit plus d'une possibilité plus théorique que pratique, tant les aléas sont nombreux.

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• Quel est le rôle des agences de notation ?

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Les agences de notations - au nombre de trois dans le monde - sont des agences privées et indépendantes qui attribuent une note financière aux pays ou aux entreprises. Les investisseurs se basent sur cette note pour savoir quel est le niveau de risque des obligations qu'ils achètent. Chaque agence à sa propre méthodologie. Standard & Poor's, par exemple, attribue la note «AAA» aux meilleurs émetteurs, puis descend ensuite à «AA» puis «A» et «BBB». À chaque fois, ces notes sont assorties de signes + ou -. Ensuite, les notes descendent à «BB» et sont alors considérées refléter le niveau d'obligations «pourries»… D'une façon générale, la note reflète le pourcentage de probabilité que l'émetteur fasse défaut. Ainsi, un émetteur noté triple AAA, comme la France, a 0% de probabilité de faire défaut en trois ans. Un émetteur «BB», comme l'est désormais la Grèce, a 23,08% de faire défaut d'ici à trois ans.


• La Grèce peut-elle faire faillite ?

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Crédits photo : AFP

Non, la Grèce ne peut pas faire faillite. Du moins pas dans le sens où on l'entend pour une entreprise dont les biens sont saisis faute de pouvoir payer ses créanciers. Il n'existe d'ailleurs pas d'instance qui pourrait décider la faillite d'un État.

Mais la Grèce peut parfaitement se retrouver en défaut de paiement, incapable de rembourser ce qu'elle doit. Cette situation n'est pas nouvelle. L'Argentine, en 2001, n'avait pas pu payer 100 milliards de dollars de dettes. Il avait fallu attendre 2005 pour que ce pays trouve un accord avec ses créanciers qui avaient dû abandonner au passage les deux tiers de leurs fonds.

Si Athènes faisait défaut, elle verrait aussitôt s'évanouir la confiance des investisseurs, qu'ils soient publics ou privés, et ne pourrait plus emprunter. Goldman Sachs envisage clairement ce scénario de banqueroute, tandis qu'un économiste allemand affirme que la Grèce ne remboursera jamais les fonds que Berlin entend débloquer. À l'inverse, Herman Van Rompuy et Jean-Claude Trichet, respectivement présidents de l'Union européenne et de la Banque centrale européenne, écartent toute menace de défaut de paiement et toute idée d'une restructuration de la dette grecque.

Restructuration qui, estime l'agence de notation financière Standard & Poor's, ferait que seuls 30% à 50% des créances du pays seraient honorées. La Grèce, en cessation de paiement, serait exclue temporairement du système financier international.

Cela ne veut pas dire qu'elle sortirait de la zone euro, mais Athènes signerait son effondrement économique et politique sur la scène mondiale. Une faillite qui ne dit pas son nom.

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• Y a-t-il un risque de contagion au reste de la zone euro ?

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La contagion n'est pas inéluctable. Mais le risque est grand. «Les projecteurs vont maintenant davantage se tourner vers d'autres pays lourdement endettés de la zone euro», prédit un économiste chez ANZ Bank. Outre la Grèce et le Portugal, ces pays sont l'Italie, l'Espagne et l'Irlande, dont la dette publique atteindra pour 2010 respectivement 116,9%, 55,2% et 64,5% du PIB (produit intérieur brut). Des pays dont les déficits budgétaires sont très élevés et qui doivent tous payer très cher pour emprunter sur les marchés. Mercredi, Rome a eu beaucoup de mal à placer 13,5 milliards d'euros de bons du Trésor. Madrid - dont la note financière a été dégradée dès mercredi par Standard and Poor's - compte ramener son déficit de 11,2% du PIB à 3% en 2013, mais les marchés ne croient pas à sa capacité de le faire. Les couvertures que le Portugal et l'Espagne doivent prendre contre les risques de faillites atteignent des niveaux historiquement élevés. Le vice-président de la Banque centrale européenne le dit: la Grèce n'est pas la seule en difficulté. Et un sondage publié mercredi dans le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung montre que 61% des Allemands sont convaincus que d'autres pays de la zone euro vont tomber parmi les Pigs - les «cochons» en anglais -, initiales du Portugal, de l'Italie, de la Grèce et de l'Espagne (Spain).

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• Quels risques pour les banques européennes ?

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Crédits photo : AFP

En tant que tel, l'impact d'un défaut de la Grèce sur le secteur bancaire européen serait marginal. Les experts arrivent à cette conclusion rassurante avec deux bémols importants toutefois. Le premier, c'est le risque de contagion sur lequel les marchés ont joué à se faire peur ces derniers jours. Si la Grèce fait défaut, quid du Portugal, de l'Espagne ou de l'Irlande? Ce serait une crise d'une tout autre dimension. Autre point important, si globalement le secteur bancaire européen peut absorber le choc d'une ­restructuration lourde de la dette grecque, certains acteurs seraient fortement affectés. Ce sont ceux là que les marchés traquent.

Or, comme d'habitude, personne ne sait qui porte quel risque. Tout le monde se raccroche aux statistiques de la Banque des règlements internationaux datant du mois de décembre. Selon ­elles, les institutions financières françaises sont les plus exposées sur la Grèce, avec 75 milliards de dollars de créances, devant l'Allemagne et ses 45 milliards. «La moitié de l'exposition des banques françaises est le seul fait des filiales de Crédit agricole (29 milliards d'euros d'actifs) et de Société générale (4 milliards) en Grèce» calculent les analystes du courtier britannique Evolution. De son côté, l'analyste de Credit Suisse Guillaume Tiberghien évalue à 4,4 milliards d'euros les pertes que subiraient BNP Paribas, Société générale, Dexia et autres dans le cadre d'un scénario de dépréciations des portefeuilles sur la Grèce. Crédit agricole, avec sa filiale Emporiki, est réputé le plus en risque. Interrogé mercredi sur BFM TV, Baudouin Prot, l'administrateur directeur général de BNP Paribas, a qualifié de «tout à fait négligeable» l'exposition du groupe sur les banques grecques.


• Pourquoi les marchés attaquent-ils aussi le Portugal ?

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La dégradation, mardi soir, de la note souveraine du Portugal par l'agence Standard & Poor's (S & P) a fait plonger les marchés à Lisbonne. Avec un déficit budgétaire record s'élevant à 9,4% du PIB en 2009 et une dette de 126 milliards d'euros soit 76,8% du PIB, l'économie portugaise est vue comme l'un des maillons les plus faibles de la zone euro. S & P a baissé sa note mardi après avoir révisé à la baisse les perspectives de croissance du Portugal (déjà l'une des plus faibles de l'UE) et ses capacités de désendettement d'ici à 2013. Mais «Lisbonne n'est pas Athènes», répètent les responsables portugais. D'une part, «nous n'avons pas menti sur nos statistiques», souligne le ministre des Affaires étrangères. D'autre part, le pays a engagé une cure d'austérité (gel des salaires, privatisations, etc.) qui provoque d'ailleurs des grèves, cette semaine dans les transports. Signal positif adressé mercredi, le premier ministre socialiste Jose Socrates, minoritaire au Parlement, a reçu le soutien de l'opposition sociale-démocrate pour accélérer les mesures de rigueur. Et celui de François Baroin à Paris et du ministère des Finances à Berlin, qui insistent: le Portugal «n'est pas comparable à la Grèce» et ne suscite pas l'inquiétude.

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• La France a-t-elle des raisons de s'inquiéter ?

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Le niveau de la dette française est élevé - Bercy l'anticipe à plus de 83% du PIB à la fin de l'année - et ses finances publiques loin d'être réjouissantes. Mais aujourd'hui, «même si on surveille ça comme le lait sur le feu, il n'y a pas de contagion possible», répond l'entourage de Christine Lagarde.

En clair, la France n'est pas en situation de se retrouver face à un marché qui ne voudrait plus la financer et se détourneraient des emprunts d'État. D'abord, elle est notée AAA - la meilleure note possible, celle qui lui permet d'emprunter aux taux les plus avantageux - par les agences de notation. «Et des pays AAA en Europe, il n'y en a pas tant que ça!», insiste-t-on à Bercy. De fait, l'Italie et la Belgique ne l'ont plus depuis longtemps, l'Espagne et l'Irlande l'ont perdu avec la crise.

Du coup, la France serait même gagnante face à la situation grecque. «La fuite des investisseurs vers la qualité nous est bénéfique», indique une source gouvernementale. En d'autres termes, la France fait office de refuge pour les ­investisseurs qui cherchent la sécurité en Europe.

Le ministère de l'Économie veut d'ail­leurs croire que cette situation va durer «dans la mesure où nous avons un programme de rétablissement de nos finances publiques qui va nous ramener dans les clous» d'ici quelques années.

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