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Formation continue : les MOOC font leur timide révolution

Formidables outils de formation tout au long de la vie, les cours en ligne interactifs séduisent, mais peinent encore à s’imposer.

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Publié le 17 mars 2015 à 19h06, modifié le 19 août 2019 à 13h07

Temps de Lecture 5 min.

Ce n’est pas une révolution, encore moins un tsunami. Le numérique fait une entrée discrète dans le secteur de la formation continue. Beaucoup lui prédisent pourtant un bel avenir grâce aux cours interactifs en ligne appelés MOOC (acronyme de massive open online courses), en plein essor en France, et à leurs dérivés plus intimistes, les SPOC (small private online courses), destinés à de petits groupes et davantage encadrés.

« Au départ, nous nous sommes lancés dans des MOOC plutôt conçus comme des formations d’excellence, largement académiques, dit Olivier Faron, l’administrateur du CNAM, le Conservatoire national des arts et métiers. Et nous voyons aujourd’hui que cela peut être aussi de formidables outils de formation tout au long de la vie. On apprend donc en marchant. » Depuis plusieurs années, son établissement, spécialisé dans la formation professionnelle, délivre près des deux tiers de ses enseignements à distance, au sens classique du terme – envoi de cours en ligne, devoirs, corrigés… Récemment, il a créé des MOOC, dont le cours phare « Du manager au leader ». Avec près de 40 000 inscrits, il caracole en tête sur la plate-forme FUN (France université numérique).

Trop d’obstacles

Olivier Faron discute avec des entreprises désireuses de travailler avec le CNAM, notamment pour des formations numériques sur mesure de type SPOC. Mais, à l’instar de la plupart des experts, il ne constate pas de ruée vers des formations en ligne. Il reste encore trop d’obstacles à surmonter.

La formation continue est un univers complexe, avec des règles en cascade qui évoluent sans cesse. Il faut par exemple faire valider les cours que l’on propose pour qu’ils figurent au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Puis il faut obtenir l’accord des organismes financeurs. A chaque fois, les démarches sont lourdes.

Traditionnellement, la formation continue s’appuie sur le « présentiel ». Les entreprises veulent avoir la certitude que le salarié assiste bien aux cours. Et pour cela, il doit émarger, physiquement, sur une feuille de présence. Comment faire lorsqu’il s’agit d’un MOOC ? Le salarié est devant son écran. Même s’il entre son nom et son mot de passe pour suivre les séquences vidéo, faire les quiz, échanger avec ses « pairs » (des apprenants comme lui) ou avec un professeur, comment être sûr que c’est bien lui qui fait les exercices au final ?

« Pour tous nos MOOC, nous délivrons aux participants ayant été jusqu’au bout une attestation d’assiduité indiquant qu’ils ont cliqué, suivi les séquences et fait les exercices, mais ce n’est pas une certification à proprement parler portant sur les compétences acquises », souligne Olivier Faron, aux yeux duquel il s’agit là de la prochaine étape urgente. Sur la pédagogie aussi, il reste encore à faire, selon lui : « Quelque 20 % des inscrits à notre MOOC Du leader au manager vont jusqu’au bout. Ce qui n’est pas mal. Les Américains parlent, eux, souvent de 10 %. Mais cela prouve que l’on peut progresser pour mieux accrocher les apprenants. »

Enjeu financier

Président de l’université de Cergy-Pontoise et responsable de la commission numérique à la Conférence des présidents d’université (CPU), François Germinet croit en l’avenir de ces cours en ligne, pour les étudiants comme pour les salariés. Mais l’université française accuse un immense retard – elle ne compte que pour 2 % du secteur de la formation continue, selon un récent rapport officiel qui s’en alarmait. Et on ne le comblera pas d’un coup de baguette magique. « Le premier objectif est de nous y faire une place, explique François Germinet. Ensuite il faudra voir le rôle que peut y jouer le numérique. »

Derrière le défi, il y a un enjeu financier, surtout pour les universités qui se plaignent des crédits insuffisants de l’Etat et ont souvent du mal à boucler leurs budgets. « A court terme, cela ne résoudra pas nos problèmes de financement, prédit le responsable de la CPU, mais à moyen terme, cela peut jouer. » Il pointe un autre enjeu, tout aussi important : « Aux yeux de nos partenaires socio-économiques, nous devons faire la preuve que nous ne nous cantonnons pas à déverser des diplômés sur le marché, mais que nous sommes aussi capables de former tout au long de la vie. »

A Cergy-Pontoise, François Germinet a déjà mis en place un SPOC avec un tutorat renforcé intitulé « Pédagogie managériale », qui est réservé aux étudiants se destinant à devenir professeurs. Son université participe aussi aux quatre MOOC « Initiation à l’informatique » présents sur la plateforme FUN. A l’avenir, il se voit bien développer de front les deux : « Les MOOC servent avant tout au rayonnement et à la visibilité. Les SPOC sont plus adaptés aux besoins des entreprises ou de formations ciblées. »

S’adapter au numérique

Mathieu Nebra est cofondateur d’OpenClassrooms, première plate-forme européenne d’éducation en ligne spécialisée dans le numérique – animation des réseaux sociaux, codage, Web design, etc. Il revendique 3 millions de visiteurs uniques par mois et 1 million d’inscrits. OpenClassrooms délivre des certificats de compétence pour tous ses MOOC grâce à un dispositif de contrôle, avec webcams et surveillants durant les examens. Elle fait payer ces certificats – seul moyen de gagner de l’argent avec les MOOC, les cours eux-mêmes étant par définition gratuits.

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D’après lui, le numérique va devenir « une composante majeure de la formation professionnelle ». En attendant, OpenClassrooms est le premier en France à avoir déposé un dossier pour faire inscrire au RNCP sa formation en ligne de développeur Web. La démarche traîne en longueur. « Le premier pas est toujours le plus long ; après, ça ira plus vite », assure-t-il. Sa société a fait un choix : pas de SPOC, que des MOOC. « Pour nous, les SPOC sont trop proches d’une formation initiale classique que l’on adapte en ligne, avec le risque de retrouver le manque de dynamisme pédagogique que l’on observe en classe, explique-t-il. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils font moins peur aux entreprises. Peut-être faudra-t-il les deux dans un premier temps. »

Aussi pressé soit-il, Mathieu Nebra est réaliste. Les deux mondes ne se connaissent pas. « Les entreprises ont une vraie curiosité, un vrai intérêt. Mais, mal renseignées, elles hésitent encore à franchir le pas », dit-il. Il faudra donc convaincre avant d’emporter la partie. Mathieu Nebra s’y emploie et, pour vanter les MOOC, il affirme « mener un travail d’évangélisation des entreprises ».

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