Consigny - Un remaniement aux antipodes des attentes des Français

Jean-Vincent Placé a enfin le maroquin dont il rêvait tant. Mais la vie publique souffre de ces comportements qui démonétisent la parole politique.

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Après quatre ans d'inertie, la radicalité, la vraie, est aujourd’hui la seule voie possible, estime Charles Consigny.
Après quatre ans d'inertie, la radicalité, la vraie, est aujourd’hui la seule voie possible, estime Charles Consigny. © FRED DUFOUR

Temps de lecture : 3 min

Jean-Vincent Placé a eu son maroquin. Il en rêvait. Il ne pensait qu'à ça. Beaucoup n'ont pas résisté à dire qu'il s'était enfin placé, et il paraît difficile de leur reprocher cette boutade tant l'ambition du sénateur était devenue grotesque. Il rejoint un navire à la dérive, inopérant, dysfonctionnel, mais il aurait rejoint n'importe quel navire pourvu qu'il eût pu se faire appeler « Monsieur le ministre » en montant à son bord, car l'usage veut que l'on appelle comme cela les secrétaires d'État aussi. Pourquoi François Hollande l'a-t-il nommé ? Pour ses compétences en matière de « réforme de l'État et de simplification » (c'est son domaine d'attribution) ? Pour ses compétences tout court ? Ou simplement parce que cela lui permet de torpiller une candidature écologiste en 2017 ? Je vous laisse deviner. Une bonne réforme de l'État pourrait consister, par exemple, à supprimer le Sénat, où est élu M. Placé, mais alors ce dernier n'aurait pas pu devenir ministre ! Avec cette nomination, le serpent de l'administration pléthorique se mord la queue.

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Quatre ans déjà, et rien

Le président de la République a fait l'exégèse de ses décisions dans une interview qui est passée inaperçue et dont on n'a rien retenu. Or c'est déjà bientôt la fin du quinquennat ! Comme le temps passe ! François Hollande est un peu comme un lycéen qui aurait assuré toute l'année au conseil de classe qu'il allait s'y mettre et qui, finalement, n'aurait jamais commencé à travailler. La procrastination est une douce inclination naturelle de l'homme, propice à la poésie et au rêve, mais, si l'on y est enclin, on ne vise pas les plus hautes fonctions de l'État. Quatre ans déjà, et rien : aucune réforme majeure, aucun résultat positif et aucun éclat, aucune victoire - même symbolique -, rien. La gestion des affaires courantes, de petits ajustements ici et là, des actrices de cinéma dans les voyages diplomatiques et des discours ad nauseam, rarement inspirés ni déterminants.

La vie publique souffre de ces comportements. Ils démonétisent la parole politique et habituent à l'inertie de l'État, qui ne sait plus ni se réformer ni agir, qui semble toujours débordé et surchargé tout en paraissant tourner au ralenti. Qui défend encore l'idée selon laquelle l'administration pourrait être efficace ? qu'elle pourrait se penser comme étant au service des citoyens, au lieu de croire que ce sont les citoyens qui doivent se plier à toutes ses exigences ? que l'État peut être performant, juste, à l'écoute des protestations et des sollicitations des contribuables, soucieux de leur assurer, dans des délais brefs et sans formalismes inutiles, les services dont il a la charge, et de ne pas les taxer indûment ? Ces manœuvres politiciennes, ces débats sans fin sur des mesures et des principes, comme la déchéance de nationalité, qui devraient voir s'affronter des constitutionnalistes dans des revues de droit et non l'ensemble de la classe politique, ces grandes déclarations sans suite, comme celles d'Emmanuel Macron qui parle comme Donald Trump mais participe à un gouvernement qui agit comme Robert Hue, et ces ministres qui se maintiennent à leur poste alors qu'ils ne trouvent pas de solution aux problèmes, pourtant de première importance, qui leur sont soumis, comme Stéphane Le Foll vis-à-vis des agriculteurs et des éleveurs, tout cela affaiblit notre pays sous tous les angles, affaiblit sa démocratie mais aussi son économie, le niveau et la qualité de vie des Français qui sont en train de devenir les citoyens d'un pays pauvre, et qui sont déjà devenus les citoyens pauvres d'un pays en grave déclin.

La responsabilité est donc, désormais, du côté de l'opposition, puisque le système est ainsi fait qu'il paraît très peu probable qu'un candidat issu de la société civile puisse émerger avec des chances réelles de l'emporter. Le conseil national des Républicains, ce week-end, n'a pas laissé apparaître que les différents candidats soient conscients de l'immense attente des Français, exaspérés par l'impotence de leur administration et de leurs gouvernants. La radicalité, la vraie, est aujourd'hui la seule voie possible pour qui veut gagner la primaire en 2016 et l'élection en 2017.

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Commentaires (26)

  • mandelbe

    Bravo !Et que de très nombreux de lecteurs du point partagent !

    Mais comment interpréter la fin de l article au niveau de la radicalité : une incitation déguisée à voter FN ?

    Il aurait été intéressant qu'il aille au bout de sa pensée et qu'il développe ses arguments : ce sera peut être pour le prochain article qui sait ?

  • Aphroditechild

    Ce remaniement gouvernemental semble à la hauteur d'un Président "normal" si banal qui déjà n'a pas le charisme d'un vrai Président de la République et que même si il le voulait, il n'aurait pas pu choisir des personnalités plus calées que lui. Si des politiciens avérés prétendent que ses options portent comme un Premier Secrétaire de Parti, on ne peut que s'imaginer de la suite. Le retour de J. M. Ayrault qui a perdu toute dignité reste surprenant mais les socialistes nous ont habitués à tant de magouilles que leurs abus n'étonnent plus personne. Après pour les économies promises, F. Hollande a embauché encore des fonctionnaires de plus, inutiles et surtout incompétents, sans aucune expérience.

  • stephane75008

    Ce we Francois Fillon a, au contraire de ce que vous affirmez, pris toute la mesure de l'état du pays et de l'exaspération des Français. Prenez le temps de l'écouter !