François Hollande au Palais de l'enlisé

Mais qu'est-il allé faire dans cette galère ? Le chef de l'État ne parvient plus à se sortir de l'interminable feuilleton de la déchéance de nationalité.

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Le président, à qui tout souriait ou presque, s'est embourbé dans une révision constitutionnelle qui semble compromise.
Le président, à qui tout souriait ou presque, s'est embourbé dans une révision constitutionnelle qui semble compromise. © AFP

Temps de lecture : 4 min

Comment, en un mois et demi, le chef de l'État a-t-il pu devenir le locataire du Palais de l'enlisé ? Pourtant, en cette fin d'année 2015, il avait presque réussi le grand chelem : les attentats du 13 novembre lui avaient permis de rebondir dans les sondages, évitant du même coup le procès en insécurité que la droite avait tenté de lui faire au Parlement dès le mardi suivant…

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Le chef de l'État passait également avec succès la rampe du discours du Congrès à Versailles. Ses accents martiaux furent applaudis debout par les parlementaires, y compris par la droite ! De même que sa grande crainte d'une quasi-guerre civile contre les musulmans de France n'a pas eu lieu. Un soulagement pour l'exécutif.

Trop confiant ?

François Hollande enchaînait ensuite avec un accord inattendu sur la COP21, alors que bien des commentateurs jouaient les Cassandre depuis de nombreux mois. Dans la foulée, les régionales permirent à la gauche de sauver les meubles en glanant cinq régions, au lieu des trois promises. Mieux : c'est la droite qui apparut divisée sur le « ni-ni » et dut, pour gagner, compter sur les voix de la gauche… Bref, la période était faste pour le président de la République.

Et puis, arriva le conseil des ministres du mercredi 23 décembre. Était-il grisé ? Trop confiant ? S'est-il senti trop malin ? François Hollande annonce la constitutionnalisation de la déchéance de nationalité pour les binationaux nés français. Une idée jusqu'ici défendue par le FN et certains à droite… Malaise au sein du gouvernement. Crise au sein de la majorité. Levée de boucliers des écologistes. C'est le faux pas qui vient briser sa dynamique. En effet, depuis, tout s'effondre…

Les démons de la gauche se réveillent

Tous les démons de la gauche reviennent en force : les frondeurs retrouvent de la voix, les hollandistes (dont Jean-Marc Ayrault) sont à cran, le retour des écologistes de EELV au sein du gouvernement s'éloigne brutalement, la question des primaires revient sur le tapis, et – cerise sur le gâteau – Christiane Taubira démissionne sur ce « désaccord majeur »... Au bout du compte, ce sont les conditions mêmes d'une candidature Hollande en 2017 qui sont mises en doute. Pourra-t-il vraiment rassembler les morceaux éclatés de cette gauche et se présenter comme son champion ?

Pis, Manuel Valls, chaud partisan de la déchéance et qui la défendra sur tous les tons, est soupçonné par les proches de François Hollande de mener son propre jeu, en coupant le chef de l'État d'une large partie de sa majorité. Que vaut en effet cette gauche de gouvernement si une centaine de députés refusent la révision constitutionnelle ? Quelle crédibilité peut conserver le président si sa révision constitutionnelle est repoussée par les siens ?

La droite refuse la création d'apatrides

« Dès le mercredi 23 décembre, au vu des premières réactions à gauche, François Hollande a compris qu'il s'était fourvoyé. Mais c'était trop tard, explique son entourage. Sur cette affaire, il a été trop gourmand. » Entendre par là que sa tentative de triangulation avec cette idée de droite s'est retournée contre lui. Les tergiversations de ces derniers jours ne font que l'enfoncer davantage. Les députés socialistes avaient acquis l'assurance que la référence à la binationalité serait supprimée de la Constitution. Mais dans ce cas, en bonne logique, la déchéance devrait s'appliquer à tous les Français, quitte à créer des apatrides… « Des apatrides, certes, mais on n'est pas obligé de les expulser », expliquait Patrick Mennucci, responsable socialiste du texte au sein de la commission des Lois.

« Si on crée des apatrides, moi, je ne vote pas le texte », prévenait Éric Ciotti, député LR. « Si c'est cela, on ne votera pas cette révision », renchérit Luc Chatel, l'ancien ministre de l'Éducation nationale, proche de Nicolas Sarkozy. Même chose du côté des fillonistes. Mardi, lors de la réunion de groupe, François Fillon a indiqué qu'il ne voterait pas une révision constitutionnelle qui « ne sert à rien » et qui offrirait une victoire trop facile à François Hollande.

Les menaces de Mennucci

Ballotté par la houle, le gouvernement revient à l'idée de ne pas créer d'apatrides dans le projet de loi d'application de la révision constitutionnelle. Et subit, du coup, une nouvelle bronca des députés PS ! Mardi, au sein du groupe socialiste, Patrick Mennucci menace de démissionner de son rôle de responsable du texte au sein de la commission des Lois si le gouvernement s'obstine à traiter de manière différenciée les binationaux et les autres. Une vingtaine de députés s'expriment derrière lui, tous contre le nouveau projet de loi… Bruno Le Roux, le président du groupe PS, tente de temporiser et s'engage à obtenir une nouvelle version…

Un feuilleton sans fin, tragi-comique, sans efficacité dans la lutte contre le terrorisme… Décidément, au Palais de l'enlisé, François Hollande est pris dans les sables mouvants d'une révision constitutionnelle de plus en plus hypothétique.

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Commentaires (81)

  • issartier

    Un grand fiancé. Le fiancé de Julie se comporte aussi bien qu’un Roi juste et bon, vis à vis de ses anciennes protégées, dont il s’honore d’assurer, au milieu des tempêtes qui secouent inutilement la France, la fortune et la gloire, pour bien démontrer l’ampleur de son pouvoir bienveillant vis-à-vis de son peuple, et puis peut-être aussi attirer des candidatures ? Qui sait ? Il est tellement féministe, aimant l’amour pur et désintéressé, même sans mariage.

  • OBJECTIFS

    Pépère n'a eu besoin de personne, pour s'enliser, tant il est vrai, que son égo est démesuré... Il aurait dû réfléchir avant... , de s'engager dans un casting pas fait pour lui, en 2011... Il risque de le payer très cher ! D'ailleurs, à tous les candidats, à la Présidence de la République, le Peuple devrait exiger de leurs parts, une forte expérience de secteur privé et public, par un séjour d'au moins 5 ans, pour comprendre enfin, le quotidien des Français... , avant d'engager la FRANCE, et les Français, dans leurs turpitudes... Pour un Président élu, il ne peut considérer que la FRANCE... , lui appartient ! Pourquoi cet insistance de Pépère, avec son bilan catastrophique, et le rejet de 75% des Français, vouloir à tous prix, se représenter en 2017... ? Bizarre... !

  • MissPic

    De nous rappeler des textes de loi qui existent déjà, preuves d'une discussion stérile pour nous balader, une fois de plus, pensant encore nous faire perdre de vue des "trucs" indispensables comme entreprises, travail, emploi, chômage et j'en passe. À certains : un peu d'humour ne fait pas de mal et les français ont toujours abordé la vie comme cela.