La question du nucléaire iranien
Mauro Berlanda
berlandamauro@gmail.com
1
Sommaire
Page
Introduction ………………………………………………...………………………………….. 3
Le Conseil national de la résistance iranienne et l’OMPI ….………………………….……… 4
Le début des activités d’enseignement et de recherche ……………………………………….. 6
Le lancement d’un vaste plan de maîtrise de technologie et de construction de centrales nucléaires…… 7
Le TNP : voilà le nœud de la question ………………………………………………………... 8
2
Introduction
La crise actuelle concernant le programme nucléaire de l’Iran
s’est ouverte le 14 août 2002 lors de la révélation par Alireza
Jafarzadeh, représentant du CNRI (Conseil national de la
Résistance iranienne,
), de l’existence à
Natanz (
) d'une installation nucléaire secrète - des
centrifugeuses enrichissent de l'uranium provenant de la
province de Yazd, et d’une usine de production d’eau lourde à
Arak.
De la construction de ce site, apparemment déjà individué par le
Mossad sous le nom de Kashar, est chargé la société Kala
Electric.1
2
1
2
http://www.globalsecurity.org/wmd/world/iran/natanz.htm
http://www.globalsecurity.org/wmd/world/iran/natanz5.htm
3
Le Conseil national de la résistance iranienne et l’OMPI
Le Conseil national de la Résistance iranienne est le « parlement en exil de la Résistance
iranienne » . Le CNRI est une vaste coalition politique composée de cinq organisations politiques et
partis et plus de 540 personnalités politiques, culturelles et sociales, des spécialistes, des artistes,
des intellectuels, des champions de sports, des scientifiques, des officiers de l'armée et des
commandants de l'Armée de libération nationale iranienne. 3
Le groupe d’opposition le plus grand à l’intérieur de l’Iran, l'Organisation des moudjahiddines du
peuple iranien, compose aussi la majorité des membre du CNRI.
L’OMPI (
, S zm n-e Moj hedin-e Khalq-e Ir n) est une
organisation politique fondée en 1965 par un petit groupe d’intellectuels mené par
Mohammed Hanifnejad en visant à renverser la dictature de Mohammed Rezâ
Pahlavi qui, aidé par les services secrets britanniques et états-uniens, avait mit fin,
en 1953, au gouvernement socialiste de Mohammad Mossadegh intentionné à
nationaliser les ressources pétrolières et redistribuer les richesses au peuple. Dans
son rapport annuel de 1975, Amnesty International écrivait à cause des activités de la Savak:
« Aucun pays au monde n’a de bilan pire que l’Iran [du shah] en matière de Droits de l’homme ». 4
Affaibli par la guérilla urbaine menée pendant cette période, lors de la Révolution du 1979 l’OMPI
n’arrive pas à jouer le rôle politique dont il rêve. En juin 1979, car les autres formations
d’opposition au pouvoir - les Fedayin du peuple et le PDK (Parti démocratique kurde), subissent de
violentes dissidences interne (les premiers à propos de sa ligne « anti-impérialiste », le deuxième à
cause des suspectes relations avec l’OTAN)5, les Moudjahiddines en deviennent la principale à
travers une interprétation « socialiste » du Coran, qui leur permet de développer « une vision
autogestionnaire de l’organisation politique de la communauté islamique » qui « doit devenir son
propre "imam" » : le pouvoir est donc exercé à la base, et non pas par la classe des théologiens.6
Cette différence idéologique comporte pour les Moudjahiddines l’exclusion de toute position du
pouvoir, c’est-à-dire du Conseil de la Révolution et du gouvernement provisoire de Mehdi
Bazargan, et des vagues répressives qui obligent le mouvement à agir dans une semi-clandestinité.
Lors du déclenchement de la guerre Iran-Irak, en septembre 1980, l’OMPI devient pour les
puissances occidentales un moyen pour créer un second front à l’intérieur de l’Iran. Alliés objectifs
de la France et des États-Unis, les Moudjahiddines vont perdre tout soutien populaire
consécutivement aux émeutes à l’Université de Téhéran en mars 1981 et surtout à l’attentat
terroriste du 28 juin, qui a décimé les cadres du PRI. En juillet 1981,
le chef de l’organisation
Massoud Radjavi se réfugie à Paris, d’où il permet à la France et aux États-Unis de frapper de cibles
sur le sol iranien. Mais la multiplication des attentats iraniens sur le sol français (prise d’otages de
ressortissant français au Liban en printemps 1985, attentats à Paris du 3 au 5 février, du 16 au 20
mars et du 1er au 17 septembre 1986) et la prise du pouvoir de Chirac, poussent la France à
négocier avec Téhéran : d’ici le choix de l’OMPI de transférer principaux centres d’opération sur
les terres de Saddam Hussein en 1987. En fait, à la suite de son expulsion de la France, Massoud
Radjavi trouve soutien à Bagdad et il y organise l’assassinat de Ali Iranmanesh7 et obtient la
3
http://www.ncr-iran.org/fr/?option=com_content&task=view&id=5&Itemid=80
http://www.voltairenet.org/article12526.html
5
ibidem
6
« La guerre ouverte succède au conflit de tendances au sein du mouvement islamique iranien », par Ahmad
Fraoughy, Le Monde diplomatique, août 1981
7
« Iran : un responsable provincial assassiné », Le Monde d’après l’AFP, 19 février 1987.
4
4
suspension des bombardements durant deux semaines. Après ces événements, en août on a une
fracture au sein de la classe politique américaine sur l’utilisation des Moudjahiddines. 8
À la suite du rapprochement pétrolier Iran-États-Unis et des attentats aux World Trade Center du
1993, les Moudjahidin sont déclarés « terroristes » en 1997 . Cette coopération poursuive même sur
le plan militaire, en tant que en 2002 l’Iran obtiennent l’inscription de l’OMPI dans la liste des
organisations terroristes et de l’aide en vue de les éliminer grâce aux bombardements de leurs bases,
en échange du soutien iranien en Irak. 9
Pour ce qui concerne la France, on a leurs mise au ban en raison de protéger « les intérêts supérieurs
de l’Etat » : en novembre 1993 la présence de la femme de Massoud Radjavi crée une crise
diplomatique entre la France et l’Iran qui se manifeste à travers les attentats du 9 novembre à
l’ambassade de France et aux locaux de Air-France à Téhéran.
Même si un rapport de mission d’enquête pour le Parlement Européen10 les présente comme les
seuls défenseurs du droit de l’homme et du libre marché dans un pays théâtre des exécutions des
femmes enceintes et des enfants de 11 ans11 ; même si en juillet 2004 le statut prévu par la
quatrième Convention de Genève du 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de
guerre a été accordé aux membres des Moudjahiddines du peuple en Irak12, même si le 26 janvier
2009, l'OMPI a été rayée de la liste d'organisations terroristes de l'Union européenne, après une
longue bataille juridique et une condamnation des États européens par la Cour de justice des
communautés européennes13, il faut considérer que l’OMPI a toujours entravé et saboté le travail du
régime de la République islamique et donc, à cause de ses action contre l’intérêt de l’Iran, il est vu
par les iraniens comme un mouvement de traîtres et finalement il n’a aucun prestige dans le pays.
On a la confirme encore une fois que le programme nucléaire est teinté par des décisions et des
enjeux politiques qui l’éloignent de ses aspects techniques et légaux, et pour mieux comprendre
cette crise est fondamentale retracer les principaux événement historique dès 1957 (date du début du
programme américaine Atoms for peace) à la Révolution 1979, les conséquences de la guerre IranIrak, la situation actuelle du point du vue américain et iranien, sans omettre certaines analyses
juridiques liées au TNP, techniques par rapport au cycle d’enrichissement et à la centrale de
Boucher et en matière de géostratégie à partir de la pensée de Tabatabaëi14.
8
Mise au point du département d’État sur ses contacts avec les Moudjahidin », Le Monde d’après AFP, 24 avril 1987.
« Behind the rhetoric, US and Iran cooperating over Iraq », AFP, 1er décembre 2002
10
« Les Moudjahiddines du peuple d’Iran – Rapport de mission d’enquête » André Brie et Paulo Casaca assistés par
Me Zabeti pour Les Amis d’un Iran Libre – Parlement Européen ;
http://www.ncr-iran.org/fr/images/stories/advertising/hrw%20book%20french-1.pdf
11
« Iran – Violations of Human Rights », par Amnesty International, publié en 1987
12
« US Sees No Basis to Prosecute Iranian Opposition “Terror” Group Being Held in Iraq », The New York Times, 27
juillet 2004
13
http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=710&nea=79&lang=fra&lst=0
14
Maître de conférence à l’université Allamah Tabatabaeï, département des Relations internationales et Etudes
régionales
9
5
Le début des activités d’enseignement et de recherche
En 1953, l’administration Eisenhower entérine l’Opération Ajax15 menée par le MI6 et la CIA en
Iran dont les objectifs sont la détrônement le gouvernement de Mohammad Mossadegh et
l’installation au pouvoir du Mohammed Rezâ Pahlavi Chah.
« It is not enough to take this weapon out of the hands of the soldiers. It must be put into the hands
of those who will know how to strip its military casing and adapt it to the arts of peace. »16
Le président Eisenhower exprime solennellement devant l’assemblée générale de l’ONU le 8
décembre 1953 l’intention d’ouvrir les connaissance états-unienne dans les domaines d’applications
pacifiques de l’énergie nucléaire en proposant le programme « Atoms for Peace ». Les autres pays
adopteront une politique similaire.
Deux grandes « Conférence internationales sur les applications pacifiques de l’énergie atomique »
concrétisent ce nouvel état d’esprit. Elles se tiennent à Genève du 8 au 20 août 1955, puis du 1er au
13 septembre 1958. Les physiciens de l’Ouest et de l4Est pourront y échanger leurs connaissance
dans un climat de confiance réciproque. 17
En 1957, les États-Unis et l’Iran signent un accord de coopération nucléaire civile dans le cadre du
programme américain d’Atoms for Peace.
C’est à partir du 1959 que les activités d’enseignement et de recherche dans le domaine nucléaire
ont commencé en Iran : la création du Centre de recherche nucléaire de Téhéran (CRNT), opéré par
l'Organisation de l'Énergie Atomique d'Iran (OEAI) à la Faculté des Sciences de l’Université de
Téhéran a permit l’organisation des cours de physique et de chimie nucléaires au niveau de la
licence, et des cours dans le domaine des applications de l’énergie nucléaire et, en particulier,
l’utilisation des radio-isotopes dans la médecine, l’agriculture et l’industrie, ainsi que des cours
élémentaires concernant les réacteurs nucléaires au niveau de la maîtrise.
Ce centre de recherche était équipé avec un réacteur de recherche de type « swimmingpool » d’une
puissance thermique de 5MW fourni par les Etats-Unis, opérationnel depuis 1967 et fonctionnant à
l'uranium hautement enrichi, et comportait quelques laboratoires, en particulier pour l’étude et la
production de radio-isotopes.
Quelques-uns des spécialistes nucléaires ont acquis une première formation dans ce centre.18
15
Philippe Beaulieu-Brossard, Opération Ajax, 1953 : Le mythe fondateur des tensions entre l’Iran et l’Amérique
http://www.dandurand.uqam.ca/uploads/files/publications/etudes_raoul_dandurand/erd19_beaulieubrossard_091010.pdf
16
United Nations: Official Records of the General Assembly, Eighth Session, Plenary Meetings, September 15December 9, 1953, pp. 450-452
17
Paul Reuss , L'épopée de l'énergie nucléaire: une histoire scientifique et industrielle, EDP Sciences 2007 p. 41
18
http://www.strategicsinternational.com/23_06.pdf ; http://www.nnsa.doe.gov/na-20/frrsnf.shtml
6
Le lancement d’un vaste plan de maîtrise de technologie et de construction de centrales
nucléaires
Comme indiqué par le reportage de Jacques Poux pour le JT 20h du 16
octobre 196119, le Chah d’Iran visite le CEA, Centre d'Energie
Atomique de Saclay, lors de son voyage officiel avec son épouse en
France. En cours de sa visite officielle il passe en revue les centres
nucléaires français où sont formés les physiciens français.
Cette visite établit l’amitié entre le deux pays20 et marque le début de leur collaboration qui
poursuivra avec le voyage officiel du général De Gaulle après deux ans et la signature de l’accord
Eurodif en décembre 1974, qui sera traité dans les détails plus tard.
En 1972, le Président Richard Nixon annonce la politique américaine sur la sécurité dans la région
de Golfe Persique en identifiant l’Iran et l’Arabie Saoudite comme les deux piliers de cette
politique. 21
Le président s’engage à permettre à l’Iran d’acheter toutes armes conventionnelles américaines dont
il avait besoin. Ceci a mené à l’achat massif de plusieurs milliards de dollars d’armements par l’Iran
au début des années 70 : une commande de 2 milliards de dollars a été placée pour l’achat des
avions de combattant, des hélicoptères et des transporteurs C-130 Hercules américains. Ceux-ci ont
été poursuivis par l’achat des avions de chasse F-14 Tomcats, des avions de commande et de
surveillance d’AWACS, les destroyers de la classe Spruance, les missiles Phoenix et Maverick et un
système de surveillance électronique IBEX à coût de $500 millions. Le Chah a également
commandé 2000 chars britanniques Chieftain et d’autre matériel militaire d’Israël.
De 1973 à 1978, les compagnies américaines ont livré plus de 8 milliards de dollars d’armes à
l’Iran, soit environ un tiers des 34 milliards de dollars de la commande totale. 22 L’Iran a également
acheté 200 hélicoptères américains produits en Italie et des centaines de véhicules blindés.23
De plus, il y avait une entente tacite entre les États-Unis, l’Iran et Israël sur la suprématie militaire
de ce dernier dans le Moyen-Orient proprement dit tandis que l’Iran dominerait l’Asie occidentale.
Les différentes administrations américaines ont conclu que permettre à l’Iran de dominer le Golfe
Persique combleraient le vide de pouvoir créé par le retrait britannique de la région vers le début
des années 1970.24
L’Iran a signé le Traité de non-prolifération nucléaire le 1er juillet 1968 et l’a ratifi é le 2 février
1970. Le 15 mai 1974, l’accord de garanties TNP entre l’Iran et l’AIEA sera mise
en oeuvre.
19
http://www.ina.fr/art-et-culture/mode-et-design/video/CAF89015513/le-shah-d-iran-a-paris.fr.html
http://www.parstimes.com/history/shahfrance.ram
21
Roger M. Savory, “Religious Dogma and the Economic and Political Imperatives of Iranian Foreign Policy,” in Miron
Rezun, Iran at the Crossroads: Global Relations in a Turbulent Decade, San Francisco, Westview Press Inc., 1990, 53.
22
Patrick Clawson & Michael Rubin, Eternal Iran: Continuity and Chaos, New York City, Palgrave Macmillan, 2005, p. 83
23
C.D. Carr, “The United States-Iranian Relationship 1948-1978: A Study in Reverse Infl uence,” in Hossein
Amirsadegh, eds, The Security of the Persian Gulf, London, Croom Helm, 1981, p. 75.
24
C.D. Carr, Op. cit. p. 74.
20
7
Le TNP : voilà le nœud de la question
« Les États qui concluent le présent Traité, ci-après dénommés les « Parties au Traité ».
Considérant les dévastations qu'une guerre nucléaire ferait subir à l'humanité entière et la
nécessité qui en résulte de ne ménager aucun effort pour écarter le risque d'une telle guerre et de
prendre des mesures en vue de sauve garder la sécurité des peuples »25
L’ensemble des argumentations des pays occidentaux concernant la crise commencée en 2002
repose sur le Traité de Non Prolifération nucléaire et le système de contrôle et garanties de l’Agence
Internationale pour l’Énergie Atomique.
Avec le TNP, les trois pays architectes et dépositaires de ce traité (Etats-Unis, Union Soviétique et
Royaume Uni) s’engagent à étendre les applications pacifiques de la technologie nucléaire aux pays
non détenteurs d’armes nucléaires. En échange de la promesse de renoncer à l’arme nucléaire26, il y
a la reconnaissance du droit inaliénable de toutes les Parties au Traité de développer la recherche,
la production et l'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques, sans discrimination et
conformément aux dispositions des articles premier et II du présent Traité 27 accompagnée de
l’engagement à faciliter un échange aussi large que possible d'équipement, de matières et de
renseignements scientifiques et technologiques en vue des utilisations de l'énergie nucléaire à des
fins pacifiques. 28
De plus, chacune des Parties au Traité [Etats-Unis, Union Soviétique, Royaume-Uni, France et
Chine] s'engage à poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives à la
cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée et au désarmement
nucléaire, et sur un traité de désarmement général et complet sous un contrôle international strict
et efficace.29
La réception de ce traité a été différente selon le contexte national :
-
pour bénéficier des promesses qu’il comporte, des pays qui n’avaient ni le potentiel
nécessaire, ni la motivation sécuritaire et politique pour fabriquer l’arme nucléaire y ont
adhéré ;
un certain nombre de threshold countries (pays potentiellement aptes à produire l’arme
nucléaire ont refusé d’y adhérer : l’Inde, le Pakistan, l’Afrique du Sud, l’Argentine, Israël,
l’Egypte, l’Algérie. Ils ont adhéré au traité plus tard, sauf l’Inde, le Pakistan et Israël ;
la Corée du Nord a exercé en 2003 le droit prévu par l’article X de ce traité de s’en retirer. 30
25
http://www.un.org/fr/conf/npt/2010/npttext.shtml
Traité de non prolifération nucléaire, art. II : « Tout État non doté d'armes nucléaires qui est Partie au Traité
s'engage à n'accepter de qui que ce soit, ni directement ni indirectement, le transfert d'armes nucléaires ou autres
dispositifs nucléaires ou du contrôle de telles armes ou de tels dispositifs explosifs; à ne fabriquer ni acquérir de
quelque autre manière des armes nucléaires ou autres dispositifs nucléaires explosifs; et à ne rechercher ni recevoir
une aide quelconque pour la fabrication d'armes nucléaires ou d'autres dispositifs nucléaires explosifs. »
27
Ibidem, art. IV alinéa 1
28
Ibidem, art. IV alinéa 2
29
Ibidem, art. VI
30
Traité de non prolifération nucléaire, art. X alinéa 1 : « Chaque Partie, dans l'exercice de sa souveraineté nationale,
aura le droit de se retirer du Traité si elle décide que des événements extraordinaires, en rapport avec l'objet du
présent Traité, ont compromis les intérêts suprêmes de son pays. Elle devra notifier ce retrait à toutes les autres
Parties au Traité ainsi qu'au Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies avec un préavis de trois mois. »
26
8
En 1975, les pays détenteurs de la technologie nucléaire se sont réunis, à huis clos, à Londres dans
l’ainsi dit « Club de Londres » (Suppliers’ Group) pour imposer des restrictions strictes sur
l’exportation de technologie, d’équipements et de matériaux nucléaires vers d’autres pays en
violation de l’article IV du TNP. 31
Ces limitations à la résolution de l’article IV du TNP imposées par le London Suppliers’ Group ont
causé une vague de mécontentement et de protestations dans les pays qui espéraient pouvoir obtenir
l’accès à la technologie nucléaire. Pour remédier à cette situation, une grande conférence
internationale sur le transfert de la technologie nucléaire a été organisée à Persepolis et Chiraz en
Iran, en avril 1977, à l’initiative de l’OEAI et avec la coopération de American Nuclear Society,
European Nuclear Society et Japan Atomic Energy Society.
Lors de cette conférence, des avis presque unanimes ont été exprimés contre les décisions du club
des fournisseurs de Londres, non seulement de la part des responsables et spécialistes des pays
importateurs de la technologie nucléaire, mais également par les responsables de l’industrie
nucléaire dans les pays exportateurs. 32
Quant à la promesse de l’article VI d’un désarmement nucléaire total, après quarante ans elle reste
lettre morte . D’ailleurs les États-Unis ont refusé de ratifier le Traité d’Interdiction Complète des
Essais Nucléaires (TICE).33
Aujourd’hui ce qu’il reste du TNP est l’engagement des pays non nucléaires, de renoncer à
l’acquisition d’armes nucléaires (article II) et de se soumettre au contrôle de l’AIEA et à son
système d’inspection (article III) sans rien avoir en échange.
Il en résulte un contexte dans lequel un petit nombre d’Etats s’arrogent un droit qu’ils refusent à la
grande majorité des pays du monde. Il s’agit d’un système de ségrégation technologique qui va à
l’encontre des idéaux et des principes de base de l’Organisation des Nations Unies.
Et l’AIEA, chargée de la mission de promouvoir l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins
pacifiques, en assistant les pays les moins avancés pour qu’ils accèdent à la maîtrise de la
technologie nucléaire et de contrôler les activités nucléaires des pays membres pour qu’elles ne
dévient pas vers des applications militaires, à la suite de restrictions imposées par le Club de
Londres aujourd’hui n’a plus rien à offrir aux pays moins avancés.
« Il reste donc seulement la mission de contrôle qui évolue, sous l’impulsion des pays nucléaires,
vers un concept de plus en plus contraignant mettant un frein à tout échange de connaissances,
d’équipement et de matériaux dont un pays moins avancés a besoin pour exécuter un programme
nucléaire digne de ce nom, sans subir la contrainte coûteuse d’un contrôle envahissant et sans
devenir dangereusement dépendant, pendant longtemps, des pays fournisseurs. Il n’est donc pas
étonnant de voir souvent dans la littérature de langue anglaise l’expression répugnante de U.N.
watchdog agency pour dire l’AIEA. »34
31
Bertrand Goldschmidt et Myron B. Kratzer, « Peaceful Nuclear Relations : A Study of the Creation and the Erosion of
Confidence », World Nuclear Energy, Toward a Bargain of Confidence, The Johns Hopkins University Press, Baltimore
and London, 1982
32
« Proceedings of the Conference on Transfer of Nuclear Technology », Persepolis and Chiraz, Iran, 10-14 Avril 1977,
Vol. 1 à 4.
33
http://www.grip.org/bdg/pdf/g4614.pdf
34
A. Etemad Les enjeux géostratégiques entre les États-Unis et l’Iran, Mai 2009 pp. 97-98
9